une particularité de la Région des Doukkala : les tazotas

Dans la campagne d'El Jadida, au détour d'un parcours pédestre, les marcheurs jdidis ont rencontré à de multiple occasions ces constructions en pierre sèche si particulières. Elles ressemblent le plus souvent à des tasses ou des écuelles renversées. Or, en terme tamazight tazuedea ou tazoda signifie "bol". Est- ce l'origine étymologique de l'appellation ? Cette appellation n'est d'ailleurs pas sans rappeler le terme espagnol de tazota signifiant "tasse".

Si un doute a un temps subsisté quant à l'origine de ces constructions, certains les faisant remonter à l'Antiquité ou au Moyen Age, il semble démontré que ces édifices datent de la première moitié du XXème siècle. En effet, les grands voyageurs et observateurs que furent MICHAUX-BELLAIRE ou DOUTTE qui ont parcouru la région au tout début du XXème siècle entre 1915 et 1920, ne mentionnent pas dans leurs écrits l'existence des tazotas alors qu'ils décrivent avec précisions d'autres formes particulières de l'architecture dans les Doukkala. Egalement, les témoignages oraux recueillis auprès des habitants des douars, renforcent cette approche.

Selon Sylviane BATTAIS (voir : "les tazotas, résumé de mémoire" (2007)) qui a effectué un stage dans l'arrière pays des Doukkala, la thèse la plus communément admise parle de l'édification durant le Protectorat français dès l'avènement de la propriété individuelle aux alentours de 1925/1936, époque du début du processus de sédentarisation obligatoire.

C'est à la morte saison que les agriculteurs consacraient leur activité à l'édification des tazotas. Cela nécessitait le choix des pierres qui avaient été préalablement mises de côté lors des travaux consacrés à épierrer les champs. Une tazota nécessiterait environ 200 m3 de pierres.

Les tazotas ont, en général, une hauteur de 2,5 à 3 mètres bien qu'on en trouve de plus grandes. Les pierres sont choisies plates et utilisées telles que, sans découpe. La base est constituée de moellons pouvant supporter un poids de plusieurs tonnes. La voûte en encorbellement  est constituée de pierres disposées de telles façon qu'elles permettent  l'évacuation des eaux de pluie et d'éviter les infiltrations.

A quoi donc pouvaient servir les tazotas ? Il semble que leur utilisation soit diverse : refuges contre la chaleur pour les hommes et les animaux, greniers pour entreposer pailles, foins ou grains, bergeries, parfois habitations...

Il existe un ensemble de sept tazotas dans la commune de Sebt Dwib, non loin d'El Jadida. Deux sont jumelées et les cinq autres accolées en angle droit. Ces derniers, d'ailleurs, possèdent à l'étage un poste d'observation et un chemin de ronde afin de surveiller les récoltes contre les voleurs. La date de 1922 apparait sur un linteau de la maison de maître en ruine et accrédite l'idée de la contemporanéité des tazotas qui s'offrent à notre vue. Cela ne présage en rien le fait que les tazotas ressemblent aux constructions en pierre sèche du pourtour méditerranéen, plus anciennes (Sud de la Franc, Grèce, Italie...), ce qui amène les chercheurs à s'interroger sur la relation qui pourrait exister et à poser clairement l'existence d'un patrimoine commun.