- CARLE
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Date d'inscription : 01/10/2017
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A partir de 1916, l’armée française avait demandé à des mairies de bien vouloir réserver des carrés musulmans dans leurs cimetières afin d’inhumer les soldats qui mouraient dans les hôpitaux.
Dès l’été 1916, les tombes alors individuelles de ces soldats morts loin de chez eux sont fleuries par les habitants de la Mulatière comme celles des enfants du pays morts pour la France. Les écoliers et les anciens combattants de 1870 s’en chargent, effeuillant des fleurs sur leurs stèles le 1er novembre. Le 16 novembre 1918, cinq jours après l’armistice, l’armée demande un dernier carré pour cinquante hommes. Au total, deux cent deux auront été enterrés là en trois ans.
Pendant les premières années après-guerre, les habitants continuent de soigner leurs morts musulmans. Ils ne sont bientôt plus que deux cent un, car une famille tunisienne, recherchant son fils, l’a trouvé là, et a obtenu le rapatriement de ses restes. Le ministère des Pensions alloue 4 francs par tombe pour l’entretien, mais il n’accepte de prendre en charge les concessions perpétuelles que pour les soldats, et les ouvriers pris sous les bombardements de l’ennemi dans les usines de munitions. Ceux-là sont « morts pour la France ». Ils sont cent treize. Pour les quatre-vingt-huit autres, rien n’est prévu. Le maire décide alors de faire construire un caveau commun, avec un monument. Mais le ministère n’est pas chaud. Les carrés lui suffisent. Paul Nas prend alors contact avec le premier recteur de la Mosquée de Paris, également président de la Société des Habous des lieux saints de l’islam, sorte de CFCM avant l’heure... Un architecte de la région lyonnaise imagine le monument, amendé par l’un des trois architectes de la Mosquée de Paris, construite en grande partie avec des fonds français pour remercier les musulmans de leur dévouement dans la guerre. La Mosquée de Paris fait parvenir les tuiles vertes, cent vingt vernissées et quatre-vingts non vernissées. Et le caveau est terminé en décembre 1936. Les hommes sont alors exhumés. Le maire aurait voulu réunir tous ces musulmans morts, directement ou non, des violences de cette guerre. Mais le ministère ne plie pas : seuls ceux qui sont officiellement morts pour la France peuvent reposer là. La municipalité installe les autres à côté, dans une fosse commune.Le caveau est inauguré le 9 mai 1937, en présence du recteur de la grande Mosquée de Paris. "Le Progrès" du lendemain rend compte du discours prononcé par le maire. Il y explique son attachement à ces hommes. Avant-guerre, il a beaucoup voyagé chez eux. Puis du côté de Verdun, il a partagé leurs tranchées, leurs souffrances. Les a vus découvrir le froid. Maire depuis 1912, Paul Nas veut s’attacher à entretenir ce tombeau. Il le fera jusqu’à sa démission, malade, en 1939. La boucherie suivante commence. Paul Nas meurt peu après. Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, tout le monde oubliera le tombeau. Seules les herbes folles viendront encore le visiter. Jusqu’à ce que le fossoyeur du cimetière en 2006 glisse à Frédéric Couffin,qui travaillait alors sur les soldats français morts en 1914-1918 lui dit’’ « Au fond du cimetière, il y a un caveau bizarre que personne ne connaît, ça devrait vous intéresser. »
Au milieu des herbes folles en France il y aura toujours de belles fleurs.
Sources : Curieuses histoires : Le tombeau oublié des poilus musulmans.
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